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Musique : Bana Odéon reprend le micro avec un premier clip vidéo après 50 ans
*De l’ombre à la lumière : les jeunes de Kintambo ressuscitent les premiers Atalaku de l’histoire
Ils avaient disparu des radars depuis des décennies, confinés dans les souvenirs brumeux des passionnés de la musique congolaise. Et pourtant, Bana Odéon, mythique groupe originaire de Kintambo, précurseur du style "Atalaku" ce style d’animation devenu emblématique du ndombolo, s’apprête à revenir sur le devant de la scène. Un retour historique, rendu possible grâce à l’Association des jeunes de Kintambo, qui a décidé de leur offrir ce que le groupe n’a jamais eu en cinquante ans de carrière : un véritable clip vidéo. Cette annonce a été faite au cours d’une interview accordée à Forum des As le vendredi 04 mai dernier.
Bana Odéon, c’est l’écho d’une époque fondatrice, celle où les cris d’animation, les fameuses interjections rythmiques, surgissaient pour la première fois dans les orchestres congolais. Avant même que les noms de Wenge Musica ou du Quartier latin de Koffi Olomide ne deviennent des institutions, Bana Odéon en posait déjà les jalons à travers un style neuf, audacieux, résolument congolais mieux dire Folklorique.
Leurs cris d’animation dont le célèbre «Zekete Zekete», repris plus tard par Zaïko, ont marqué les prémices d’une révolution musicale qui allait conquérir l’Afrique entière.
L'éclipse de Bana Odéon
Et pourtant, malgré cette paternité incontestable, Bana Odéon sombra lentement dans les tiroirs de l’histoire. Le groupe, victime d’un manque de soutien financier et du départ progressif de ses piliers, s’est étiolé dans l’ombre. Seuls quelques initiés évoquaient encore, à voix basse, leur contribution fondatrice.
Alors que les noms de Bill Clinton, Celeo Scram ou Tutu Kaludji dominent souvent les récits de cette invention musicale congolaise, peu se souviennent que le style Atalaku a vu le jour, dans les rues de Kintambo.
«Nous avons remarqué que l’histoire de notre musique est aussi liée à la commune de Kintambo. C’est une partie oubliée de notre patrimoine», explique Esdras Wandja, président de l’Association des jeunes de Kintambo.
«En tant que jeunes, nous avons découvert qu’un groupe appelé Odéon est né ici. Et ce groupe a été le pionnier du mouvement Atalaku. Ce sont les animateurs de ce groupe qui ont introduit les premiers animateurs dans la musique congolaise. Quand on parle d’Atalaku, tout commence à Kintambo».
Injustice mémorielle,
Face à cette injustice mémorielle, ces jeunes se sont mobilisés pour réhabiliter leurs légendes locales. Faute d’archives exploitables, ils ont pris la décision d’investir dans un projet artistique neuf : financer un clip vidéo inédit pour relancer la carrière du groupe.
«On voulait rassembler leurs anciennes vidéos, mais les images étaient de mauvaise qualité et les archives limitées. Alors on a décidé de leur offrir un nouveau départ. Un clip qui ferait enfin parler d’eux après plus de 50 ans d’existence. »
Un investissement personnel, sans sponsors
La démarche est entièrement citoyenne. Aucun sponsor, aucun mécène, juste la volonté d’un groupe de jeunes attachés à leur histoire.
À travers "Morgue", Bana Odéon entend rappeler que ses membres ne sont pas des reliques du passé, mais des acteurs encore capables de transmettre un message puissant et moderne.
Le projet ne s’arrête pas là : une deuxième chanson est déjà en réflexion, avec, cette fois-ci, l’ambition d’impliquer les plus jeunes et de mettre en avant le style mbonda, autre marque culturelle propre à Kintambo.
«Nous avons utilisé nos moyens personnels. Il n’y a pas eu de bailleur de fonds. Le groupe avait déjà enregistré six chansons en studio. Nous avons choisi d’investir dans l’une d’entre elles et voir ce que cela pourrait déclencher. Si cette première chanson attire l’attention, nous pourrons continuer. Pour la suite, nous voulons intégrer les jeunes dans le projet, notamment autour du style mbonda et de l’animation, qui sont des signatures identitaires fortes à Kintambo», poursuit Esdras Wandja.
«Morgue», un titre pour marquer le renouveau
Le clip en préparation porte sur la chanson «Morgue», un titre à portée éducative, interprété par le leader historique du groupe, Ditutala Kwama Makengo, une légende vivante du genre.
«Je remercie ces jeunes qui ne sont pas comme les autres de leur âge», déclare-t-il avec émotion.
«Beaucoup nous voient comme des vieux sans importance. Mais si ton père est âgé, faut-il l’abandonner? Ces jeunes ont compris que nous avons des œuvres qui doivent être immortalisées. Si nous mourons aujourd’hui, c’est toute une page de l’histoire de la musique congolaise qui disparaît».
Dans "Morgue", Ditutala Kwama reprend certains de ses cris d’animation emblématiques, notamment ceux qui ont été repris plus tard par d’autres groupes, comme le célèbre "Zekete Zekete" adopté par Zaïko, mais introduit aussi des éléments nouveaux pour montrer que Bana Odéon n’est pas figé dans le passé.
Les clips vidéo n’étaient pas monnaie courante
À l’époque de la création de Bana Odéon, dans les années 1970, les clips vidéo n’étaient pas monnaie courante. Il fallait espérer être invité à la RTNC pour être filmé en live, souvent dans les studios exigus de Mama Angebi. La technologie manquait, les finances aussi.
«À notre époque, on ne tournait pas des clips. Il fallait espérer être invité à la RTNC pour être filmé au studio Mama Angebi. Et encore, sans financement, c’était difficile. Moi-même, bien que membre d’autres orchestres, j’ai toujours continué à soutenir Bana Odéon», se souvient Ditutala.
Le groupe a connu un déclin brutal vers 1983, aggravé par le manque de ressources, le départ de membres clés, et des opportunités manquées. L’un de ces épisodes marquants est lié à la chanson «12 enfants», composée par Miyalu. Ce tube aurait pu permettre au groupe de s’exporter en Europe, grâce à l’intérêt de Franco Luambo. Mais une mauvaise décision d’édition a fait échouer cette opportunité.
«Franco voulait l’éditer sur son label et nous emmener jouer en Europe. Mais, Miyalu a préféré signer ailleurs. Une occasion en or s’est envolée. Après cela, entre 1983 et 1984, Pépé Manzaku et Bébé Atalaku nous ont quittés pour rejoindre Zaïko Langa-Langa», regrette Makengo.
10 membres, dont six anciens
Aujourd’hui, Bana Odéon renaît avec 10 membres, dont six anciens, sous la direction de Ditutala Kwama Makengo. Parmi eux, Mawungu Ngabudiela, toujours fidèle au poste.
«Vu la situation actuelle du pays et l’évolution de la musique, je ne peux pas avoir autant de musiciens qu’avant. Nous sommes une équipe réduite, mais motivée. Et avec les jeunes qui nous accompagnent, nous voulons écrire un nouveau chapitre», conclut-il.
Christian-Timothée MAMPUYA