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En marge d’une journée portes ouvertes : Un musée privé et un centre de recherche sur l’art bientôt en construction dans la résidence de Maître Liyolo
Alfred Liyolo n’est pas mort. Artiste, il continue de vivre à travers ses œuvres érigées dans le monde.Le 13 avril dernier, il avait encore vécu par les hommes grâce à une série d’activités artistiques et culturelles organisées pour commémorer le 5ème anniversaire de sa disparition.
La résidence du regretté sculpteur Alfred Liyolo, située sur l’aile droite de la route By Pass dans la commune de Mont-Ngafula, a vibré aux sons de la musique et de la poésie. L’occasion s’est avérée propice pour rendre hommage à cet artiste hors du commun. Parents, amis, institutions et différents acteurs du secteur culturel (musiciens, peintres, écrivains, danseurs, et des professeurs…) se sont rassemblés pour honorer la mémoire de celui qu’on appelait «maître de bronze». Cela s’est déroulée dans une ambiance festive.
La journée était marquée par quatre moments forts. Tout d’abord, des témoignages poignants ont été partagés par ceux qui ont eu la chance de côtoyer Alfred Liyolo de son vivant. S’en est suivie d’une visite guidée, puis un plaidoyer fait par la fondation qui porte le nom du sculpteur et la projection d’un film documentaire.Ces récits ont permis de mieux comprendre l’homme derrière l’artiste et de saisir l’ampleur de son influence sur les générations suivantes.
LE PLAIDOYER DE La Fondation Liyolo
Directrice de la Fondation éponyme Myoto Liyolo a souligné l’importance de soutenir les artistes congolais.Rendant hommage au pionnier qu’était Liyolo, elle a rappelé son combat pour la reconnaissance de l’art. Un combat encore d’actualité, alors que « la culture rayonne partout sauf dans notre propre pays ».
» Si nous sommes tous réunis ce jour, c’est bien parce que chacun de nous reconnaît la valeur de la culture et des arts pour une nation. Liyolo, dont nous célébrons la mémoire aujourd’hui, a été un pionnier qui n’a pas eu froid aux yeux et qui s’est battu pour que son métier de plasticien et de sculpteur soit reconnu comme étant porteur de valeur « , a fait connaître la fille du sculpteur congolais.
Pour Mme Myoto, le secteur privé doit davantage prendre le relais, car « soutenir un artiste ne se limite pas à donner de l’argent ». Cela passe aussi par l’ouverture du carnet d’adresses, la promotion des œuvres, l’accompagnement dans la gestion des projets.
Elle préconise des initiatives concrètes comme des subventions en carburant pour les déplacements, ou la fourniture de matériel de création, dans un contexte énergétique difficile. « Nombreux sont les artistes qui font preuve d’une incroyable créativité malgré les obstacles « , insiste-t-elle.
Plaidant pour une démarche culturelle collective, elle considère que l’art et la culture sont des piliers du développement durable du pays, contribuant à l’éducation et à l’unité des populations.
premier musée privé d’art congolais
Un projet ambitieux a été également annoncé : transformer la résidence du célèbre sculpteur congolais Maître Liyolo en musée privé, dédié à l’art contemporain du pays. C’est ce qu’a révélé la coordinatrice de la Fondation.
» Cette maison a vocation à devenir un centre de formation et de recherche sur l’art congolais, conformément à la volonté de Maître Liyolo et de son épouse « , a déclaré Myoto Liyolo, directrice de la Fondation. Il s’agira du premier musée privé du genre en RDC, alors que l’art congolais a grandement influencé les autres arts d’Afrique centrale.
» Ce type de centre n’existe pas au Congo, sauf erreur», a lâché Myoto. Et pourtant, l’art plastique a beaucoup influé sur le reste de l’art en Afrique centrale. Mais, c’est dommage qu’on n’ait pas de centre de recherche sur l’art contemporain congolais et qu’on ait oublié ceux qui ont fait la grandeur de l’art plastique dans ce pays».
«Nous n’avons pas assez d’espace qui permet à la jeunesse d’aujourd’hui d’apprendre de son histoire, raison pour laquelle, ce musée va permettre à la communauté de comprendre non seulement qu’était Liyolo, mais aussi ses contemporains et d’assurer la tradition, c’est-à-dire, la transmission aux futures générations « , a-t-elle expliqué.
Les travaux de réhabilitation démarreront d’ici fin 2024, avec le soutien de l’Agence Française de Developpement (AFD). Un totem représentant un hippopotame, symbole de Liyolo, sera placé de manière à être visible depuis l’Université pédagogique nationale (UPN), car l’artiste avait acheté une parcelle de terre à proximité.
Pionnier de la sculpture africaine, Maître Liyolo a célébré la femme congolaise dans plus de 1000 œuvres. Avec ce musée, sa fondation entend perpétuer son œuvre et son combat pour la reconnaissance de l’art congolais.
André Yoka : témoignage d’un collègue et frère.
Dans son témoignage, le professeur Yoka a dépeint «un homme insaisissable, dont personne ne connaissait vraiment l’origine». « Oza mwana Mayi », lui disait-il affectueusement. Liyolo était un être cosmopolite, défiant les catégories.
» C’était à la fois mon collègue et mon frère, il est décédé le 1er avril, fidèle à lui-même. Jusqu’à la dernière minute, il nous a joué un tour. Quand nous avons appris sa mort, cela a créé une grande agitation ici et dans le monde entier. Liyolo est un homme singulier. Il paraît qu’il est né à Bolobo. Mais, il y a deux Bolobo sur les deux rives du fleuve. Lequel est-ce ? Personne ne le sait. Il semble qu’il soit né et ait grandi sur la rive jumelle du pool Malebo, mais laquelle exactement ? C’est tout ça, Liyolo. De son vivant, je lui rappelais toujours qu’il était comme l’eau, car personne ne sait d’où tu viens, car tu es un homme atypique et cosmopolite. «
maître du bronze et ardent défenseur de l’humain
Reconnu comme l’un des plus grands maîtres du bronze en Afrique, Alfred Liyolo a su utiliser cette matière résistante comme un moyen d’expression pour porter un message humaniste fort. « Bronze Passion, c’est l’œuvre de l’artiste« , souligne le professeur André Yoka pour qui Liyolo a su laisser une empreinte durable dans l’histoire de l’art grâce à ce médium.
» Bronze Passion, poursuit-il, tire son nom du mythe de Pygmalion dans la mythologie grecque. Il était éperdument amoureux de la déesse Aphrodite, déesse de l’amour, au point de créer une statue à son image et de tomber amoureux de cette dernière. Touchée par sa détresse, la déesse transforma la statue en une véritable déesse».
«Bronze Passion est l’œuvre de cet artiste. Le bronze, matière intemporelle et résistante, traverse l’espace et l’histoire de l’humanité. Les plus belles statues du monde sont en bronze… « . » Passion Bronze, c’est lui-même. Il a aimé cela toute sa vie. Il nous a éblouis avec son talent. Il mélangeait le classique et l’innovant, tout en restant fidèle à la convention», a conclu le Professeur Yoka Lye Mudaba. Je me souviens d’un jour où je suis allé avec lui à l’académie des beaux-arts « , a-t-il complété.
Jusqu’à la fin, Liyolo n’a eu de cesse de mettre son talent au service de valeurs humanistes, véhiculant des messages d’espoir et de dignité pour les plus démunis. Cet engagement fait de lui, aux yeux du Prof. Yoka, un défenseur infatigable de la condition humaine. Christian-Timothée MAMPUYA
À travers son œuvre, Liyolo exprimait sa passion pour le bronze et pour les figures humaines simples. Ses statues emblématiques comme » maman maraîchère » ou « Le militant du MPR » rendent hommage au peuple. Il ne sculptait pas pour les puissants mais pour les anonymes.
» Je crois c’est son éducation,Il était tout près du peuple, regardez ses œuvres par exemple les militants, la main sur la place des artistes à Matonge, ou surtout la femme marcheur . Il voulait rentre hommage au génie de l’homme ,surtout les femmes. Il en parlait tellement avec beaucoup de passions parce c’est sa vie ça , il en avait fait une oeuvre de proximité en l’honneur de ces personnes là dont on ne parle pas. Il n’a pas fait le bronze pour les princes et les princesses mais pour vous et nous « , a-t-il conclu.
empreinte indélébile sur terre
Ses œuvres, telles que les militants et la main sur la place des artistes à Matonge, reflètent sa volonté de célébrer le génie de l’homme, en particulier celui des femmes, souvent négligées. Ses sculptures en bronze dispersées dans le monde entier sont le pont vers son immortalité, laissant une empreinte indélébile de son passage sur terre. Comme l’a souligné la poétesse Yolande Elebe Ma ndembo, l’immortalité réside dans les œuvres laissées par les artistes, qui nourrissent les idéaux transmis à la postérité.
» L’univers nous rappelle combien nous sommes souvent fragiles, que la vie ne tient qu’à un fil, et toi, tu l’as compris, que l’on peut laisser nos empreintes indélébiles. Toi, l’immortel, tu l’as compris grâce à ton grain de folie qui n’était autre que du génie. Tes sculptures dispersées dans le monde sont le pont vers ton immortalité. Elles sont les traces de ton passage et de ton empreinte indélébile « , a rappelé cette femme de lettres.
Découvertes du sanctuaire du grand Maître Bronze
Dans le cadre justement de cette journée, les participants ont eu l’occasion de visiter l’atelier de l’artiste, un lieu empreint de créativité et de génie. Les sculptures majestueuses exposées témoignaient du talent inégalé d’Alfred Liyolo et de sa capacité à donner vie au bronze et autres matériaux. Cette visite guidée a permis aux visiteurs de plonger dans l’univers artistique de l’artiste et de ressentir l’énergie qui émanait de ses créations.
Dès l’entrée, les visiteurs sont accueillis par une exposition mettant en valeur les œuvres les plus emblématiques de l’artiste. Des sculptures majestueuses, des formes abstraites et des compositions originales qui rendent témoignage de la créativité et de la maîtrise de l’artiste.
Des écoliers invités
Les écolières d’un établissement d’enseignement primaire de la place étaient également invités à cette messe culturelle. À cet effet, ils étaient articulièrement enthousiastes à l’idée de découvrir l’atelier d’un artiste renommé. Guidé par madame Miyoto coordonnatrice de la fondation Liyolo , ils ont pu observer de près les différentes étapes de création d’une sculpture. Du modelage de l’argile à la réalisation finale en bronze, chaque détail du processus de création leur a été expliqué avec passion. Les jeunes visiteurs ont également eu l’opportunité de poser des questions à la guide, qui s’est volontiers prêté au jeu en partageant son expérience.
Des artistes de l’académie des beaux-arts aussi
Les artistes en herbe présents lors de cette journée ont été inspirés par la visite de l’atelier d’Alfred Liyolo. Ils ont pu se plonger dans l’univers de la sculpture et découvrir de nouvelles techniques et approches artistiques. Certains ont même eu la chance de recevoir des conseils personnalisés de la part de l’artiste renommé, une expérience inoubliable pour ces jeunes talents en devenir.
Au-delà de l’aspect artistique, cette journée portes ouvertes a également été l’occasion de sensibiliser le public à l’importance de l’art dans notre société.
Projection d’un film documentaire
Dans le lot de cette activité, un film documentaire était présenté au public, retraçant avec émotion le déroulement de ses obsèques qui avaient réuni une foule immense.
Grâce à des images d’archives et des témoignages inédits, le documentaire a permis de replonger dans l’atmosphère chargée en émotions de ce dernier hommage. On y voyait à nouveau la famille de l’artiste, effondrée par la douleur, assister à la cérémonie religieuse. Ses enfants sont notamment revenus sur ce moment très difficile à vivre.
La caméra suivait ensuite le cercueil jusqu’à sa dernière demeure sur les notes des chansons religieuses catholiques. Des fans en larmes témoignent de l’importance qu’avait eu Maitre Liyolo dans leur vie. Ce document poignant a montré que cinq ans après, le maître de bronze reste dans tous les cœurs. Un artiste inoubliable dont l’héritage musical perdure.
Cinq ans après sa disparition, Alfred Liyolo demeure une figure emblématique de l’art congolais. Considéré comme un maître de la sculpture, il a laissé une empreinte indélébile sur la scène artistique de son pays et au-delà. Son talent exceptionnel et son audace ont propulsé la sculpture congolaise sur la scène internationale.
Né en 1938 à Bolobo est une localité, chef-lieu du territoire éponyme de la province du Mai-Ndombe, Alfred Liyolo s’est formé en République démocratique du Congo avant de poursuivre ses études en Autriche, où il a obtenu un diplôme de sculpture monumentale. Cette double influence, combinant les traditions artistiques africaines et les formes modernes occidentales, se reflète dans ses œuvres.
Dans les années 1960, Alfred Liyolo a joué un rôle de pionnier en osant des styles audacieux. Il a ouvert la voie à de nombreux artistes congolais en repoussant les limites de la créativité. Grâce à son talent, la sculpture congolaise a acquis une renommée internationale. Ses expositions à travers le monde et ses activités d’enseignement ont contribué à la diffusion de son art unique.
Alfred Liyolo était un maître dans l’art du bronze. Ses sculptures réalisées dans ce matériau noble sont devenues des œuvres marquantes. « La Penseuse », créée en 1976, est l’une de ses compositions les plus célèbres. Il a également réalisé des monuments emblématiques, tels que celui rendant hommage aux mamans maraîchères à Kinshasa et le monument à Franco Luambo Makiadi. Ces sculptures monumentales ornent les espaces publics de la RDC, témoignant de l’impact durable de son travail.
Depuis sa disparition en 2019, la mémoire d’Alfred Liyolo est honorée à travers divers hommages. Les expositions récentes, telles que « Liyolo Empreinte » et « Là où règne le culte de la création », témoignent de l’importance continue de son œuvre. En novembre dernier, une pierre tombale magnifiant son travail a été dévoilée sur sa sépulture. Son héritage artistique reste vivant et continue d’inspirer les nouvelles générations d’artistes congolais. Christian-Timothée MAMPUYA