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AGRESSION DE LA RDC PAR LE RWANDA : Bilan des manifestations à Kinshasa: Commerces, maisons, véhicules, ambassades incendiés, pillés, cassés...
La capitale de la République Démocratique du Congo (RDC), Kinshasa, a été secouée, le mardi 28 janvier, par de vastes manifestations dénonçant l'agression rwandaise et l'avancée des rebelles du M23 à Goma. Ce qui devait être une mobilisation pacifique s'est rapidement transformée en scènes de violence : incendies de pneus, véhicules saccagés et routes jonchées de cendres. A cette occasion, plusieurs missions diplomatiques et commerces ont été aussi pris pour cibles, laissant un lourd bilan matériel et humain.
Un constat amer qui assombrit la capitale. Les rues de Kinshasa portent encore les stigmates d'une journée de colère qui a dégénéré en chaos. Ce qui devait être une mobilisation citoyenne pour dénoncer l'ingérence étrangère et exprimer une indignation légitime s'est transformée en scènes de violence incontrôlable, plongeant la ville dans un climat de désolation.
Partout dans la capitale, les séquelles sont visibles : des chaussées couvertes de cendres et de débris de toutes sortes, des pneus calcinés abandonnés sur les avenues, des carcasses de véhicules réduites à l'état de ferraille fumante. Les traces de destruction jalonnent les principales artères, témoignant de l'ampleur des affrontements.
comerces, maisons d'habitation, echoppes pillés
Les commerces et les habitations n'ont pas été épargnés. De nombreuses boutiques ont été pillées avec une brutalité qui laisse perplexe, leurs vitrines brisées, leurs rayons vidés comme si une vague incontrôlée de pillards avait déferlé sans retenue. Des supermarchés, souvent pris pour cible dans ce genre de manifestations, ont été dévalisés avec une rapidité choquante, comme si ces attaques avaient été minutieusement préméditées. Les propriétaires impuissants n'ont eu d'autre choix que de fuir, laissant derrière eux des années de labeur réduites à néant en quelques heures.
Les incendies ont également marqué cette journée de fureur. Des maisons et des échoppes ont été ravagées par les flammes, certains habitants regardant, impuissants, leur bien partir en fumée. À certains endroits, l'air est encore chargé de l'odeur âcre de la suie et du caoutchouc brûlé, rappelant que la capitale a été le théâtre d'une violence inouïe.
Plus inquiétant encore, ce qui aurait pu rester une simple expression de mécontentement populaire s'est transformé en un défoulement aveugle où la colère initiale a été supplantée par des actes de vandalisme et de pillage. Des scènes surréalistes ont été observées, où certains manifestants, après avoir épuisé leur énergie dans des slogans et des chants de protestation, se sont tournés vers des commerces pour les dévaliser, comme si la frénésie du moment leur donnait un prétexte pour se livrer à de véritables razzias.
Ce constat amer soulève des questions profondes sur l'encadrement des manifestations et la capacité des autorités à prévenir de tels débordements. Si la frustration de la population face à la crise sécuritaire dans l'Est du pays est compréhensible, la tournure violente qu'a prise cette journée met en lumière un malaise social plus profond, où l'exaspération face aux injustices se transforme parfois en un chaos destructeur.
le centre diplomatique attaqué
La commune huppée de la Gombe, où se concentrent les ambassades et institutions internationales, a été l'épicentre des violences. Plusieurs chancelleries ont subi des actes de vandalisme:
Comme à l'ambassade de France, des manifestants ont escaladé les murs, arraché des plaques officielles et incendié des pneus devant l'entrée, provoquant un début d'incendie. Quant à celle des États-Unis, des jets de pierres ont brisé plusieurs vitres, et des graffitis dénonçant un supposé "complot international" ont été inscrits sur les murs.
Avec celle du Rwanda, principalement ciblée, elle a été partiellement saccagée. Des véhicules diplomatiques ont été incendiés et des tentatives d'intrusion ont été signalées avant l'intervention des forces de l'ordre. Enfin, aux ambassades de la Belgique et des Pays-Bas, des manifestants ont tenté de pénétrer dans ces représentations. Aujourd'hui, les deux ambassades son fermées temporairement.
KiNtambo et Limete : entre barricades et pillages
Dans la commune de Kintambo, ce qui avait commencé par une marche pacifique s'est transformé en scènes chaotiques. Des barricades ont été érigées sur les principales artères, où des manifestants en colère ont brûlé des pneus et bloqué la circulation.
À Limete, des échauffourées ont éclaté sur le boulevard Lumumba, perturbant fortement les activités commerciales. Plusieurs magasins tenus par des expatriés asiatiques et européens ont été pillés. Le poste de police de la 7ème rue a été attaqué et partiellement incendié par des manifestants dénonçant "l'inaction du gouvernement face à l'agression du Rwanda".
Marché central et Matonge : pillages et violences
Le Marché central de Kinshasa (Zando), à la frontière entre la Gombe et Barumbu, a été le théâtre de scènes de pillage. Plusieurs étals des commerçants, notamment ceux appartenant à des ressortissants étrangers, ont été saccagés.
À Matonge, quartier généralement animé et connu pour son activité nocturne, des groupes de jeunes ont affronté la police dans des affrontements violents. Plusieurs véhicules ont été incendiés, et des commerces vandalisés.
Hier matin, la tension était encore palpable dans la capitale. Des groupes de jeunes ont bloqué plusieurs avenues stratégiques, notamment l'avenue Bas-Congo et l'avenue Luambo Makiadi, avant de converger vers l'ambassade des États-Unis, semant la panique parmi les travailleurs du centre-ville.
Des étudiants de l'Institut supérieur des techniques appliquées (Ista) ont également tenté de relancer les manifestations, mais ils ont été rapidement dispersés par les forces de l'ordre. Une dizaine de manifestants ont été arrêtés et embarqués par la police, tandis que d'autres ont été repoussés vers le marché Zando.
Une riposte ferme des forces de l'ordre et les réactions de la communauté internationale
Face à l'ampleur des violences, les autorités ont réagi avec fermeté en usant des gaz lacrymogènes et des tirs de sommation pour disperser les manifestants dans les zones les plus touchées.
Il y a eu le déploiement important des forces de police autour des ambassades et des principaux axes routiers entraînant ainsi des arrestations d'une centaine de personnes interpellées pour actes de vandalisme et troubles à l'ordre public.
Le ministre de la Communication, Patrick Muyaya, a condamné ces débordements tout en reconnaissant la légitimité du mécontentement des manifestants. Il a appelé à exprimer la colère "de manière pacifique et dans le respect des infrastructures publiques et diplomatiques".
Les attaques contre les ambassades ont suscité de vives réactions à l'étranger :
Les États-Unis, la France et la Belgique ont condamné fermement ces actes et demandé des garanties de sécurité pour leurs diplomates.
Le Rwanda a dénoncé "une agression inacceptable" contre sa représentation diplomatique et mis en garde Kinshasa contre des "actes hostiles".
Les Nations Unies ont exprimé leur préoccupation face à la montée des tensions et rappelé aux autorités congolaises leur obligation de protéger les missions diplomatiques.
Plusieurs ambassades ont temporairement suspendu leurs activités et conseillé à leurs ressortissants d'éviter les zones de tension.
climat de crise persistante
Alors que la situation reste tendue à Kinshasa, la colère contre l'implication du Rwanda dans le conflit de l'Est ne faiblit pas. De nouveaux appels à manifester circulent sur les réseaux sociaux, laissant craindre une recrudescence des violences dans les jours à venir.
Dans ce contexte explosif, le gouvernement congolais se retrouve sous pression, devant à la fois gérer la crise sécuritaire dans l'Est du pays et maintenir l'ordre dans la capitale, tout en rassurant la communauté internationale sur la protection des intérêts diplomatiques.
La RDC est à un tournant critique, et la manière dont les autorités géreront cette crise déterminera en grande partie l'évolution de la situation politique et sécuritaire dans les semaines à venir.
Jérémie ASOKO